Parmi les fous : Chapitre 15 : Barthélémy
2987 : En haut
« Barthélémy ! ! Reviens tout de suite ! ! C’est un ordre… »
Barthélémy repoussa sa mère qui essayait de le retenir et s’enfuit à toutes jambes. Il savait que cette fois ci, il n’y aurait pas de retour possible, aucune échappatoire, mais il avait envie de se battre, de leur résister, seulement pour le plaisir de sentir en vie.
Il haïssait ces gens avec qui il avait passé son enfance, ils s’étaient montrés hypocrites, le caressant, le gratifiant de douces paroles. Mais tout n’avait été que mensonges. Il considéra très vite ses semblables comme inférieurs, il les trouvait lâches et peureux, la haine l’envahissait lorsqu’il les croisait ou leur parlait. Le jeune homme prit l’habitude de rester à l’écart, il s’amusait de la souffrance des bêtes qu’il torturait dans la forêt, étudiant leur réaction. Il observa que les insectes étaient particulièrement résistants et obstinés. Il ne comprenait pas comment une araignée qui avait perdu ses huit membres, arrachés un à un avec lenteur et précision, pouvait encore avoir la force de se débattre. Elle continuait de bouger, ses minuscules yeux affolés réagissant au moindre bruit, à la moindre lumière. Frustré, il l’écrasait alors.
Les hommes n’étaient pas comme les araignées, ils renonçaient trop vite, abandonnant leur dignité pour leur survie, rampant à terre pour ne pas être frappés. Ils le dégoûtaient avec leur manières mièvres et doucereuses, leurs regards implorants, leurs paroles tremblantes et pitoyables. Il s’amusait à leur faire peur, les menaçant grâce à sa haute stature et son charisme étrange qui avait ,disait-on, quelque chose de diabolique. Les jeunes filles fuyaient quand il approchait et cela l’énervait plus encore, il les poursuivait, et une fois qu’il les avait attrapées, il leur faisait subir mille supplices, leur promettant la mort si elles le dénonçaient.
Il se souvint du jour de ses dix ans, son père lui avait offert un petit chat, il n’aimait pas l’animal pourtant il n’en fit rien paraître. Il retourna dans sa chambre avec son nouveau compagnon. Il habitait une grande maison de trois étages, ce qui paraissait démesuré lorsque l’on apprenait que seul lui et ses parents y vivaient. Il monta sur la terrasse, courant presque dans le grand escalier tant il était impatient. Arrivé, Barthélémy posa le chat sur la barrière qui les séparait du vide et s’amusa à lui faire peur. Le petit minet, affolé, perdait l’équilibre et manquait de tomber, mais chaque fois, il se ressaisissait à temps et se stabilisait. Le petit garçon se lassa rapidement de ce jeu, admirant néanmoins la ténacité du minuscule félin, il secoua la petite barrière en fer forgé. L’animal tomba en poussant un miaulement désespéré. Il s’écrasa sur le sol, une tache de sang se répandit autour de son cadavre inerte. Barthélémy eut un sourire carnassier, fier de lui, il vint déplorer la mort du petit chat à sa mère.
Mais aujourd’hui c’était différent. Le corps de l’homme qu’il avait tué reposait sur la place, à la vue de tous, sanglant. On connaissait le nom du meurtrier. On partirait à sa recherche, on le traquerait, et tôt ou tard, il serait trouvé et anéanti. Cette pensée l’amusa, il s’imagina enchaîné, l’air fier et arrogant, les fouets des bourreaux n’ayant aucune emprise sur lui. Il ramassa un bâton au milieu des bois. Derrière lui, il entendit des pas précipités se rapprochant rapidement. Arrivé dans une clairière il fit volte face et attendit résolument ses adversaires, solidement campé sur ses jambes.
Cinq hommes arrivèrent, l’apercevant, ils s’arrêtèrent et se postèrent en demi cercle autour de lui. Barthélémy leur jeta un regard furieux et se jeta sur eux, son arme frappa le premier au visage, le faisant tomber lourdement sur le sol avec un bruit mat. Les quatre autres se précipitèrent et l’attaquèrent d’un même mouvement. Parant leurs coups, le jeune homme semblait se rire d’eux, se mouvant tel un félin, ripostant avec violence et folie. L’alchimie des corps qui dansaient, échangeant parades et ripostes meurtrières, le séduisait terriblement. Le deuxième tomba à son tour, impuissant devant la rapidité de son ennemi, lorsque venant par derrière, un sixième villageois se glissa dans son dos et lui asséna un formidable coup sur la nuque. Assommé, Barthélémy s’effondra à terre.
Lorsqu’il se réveilla, il était dans un lieu sombre et froid, une odeur de mort flottait tout autour de lui. Frissonnant il se releva et observa l’endroit où il se trouvait. Ce n’était pas une prison, mais ce n’était pas l’air libre, il n’y avait pas de murs, mais le ciel n’existait pas pour autant au dessus de sa tête. Craignant le pire, Barthélémy courut en toute hâte, allant au hasard. D’un coup il s’arrêta. En contrebas s’étendait une ville sinistre et brumeuse. Il comprit. Son châtiment était encore plus sévère que la mort, ils l’avaient jeté en bas, dans ce monde de fous, dangereux et criminel.
Le souffle coupé, il contempla sans dire un mot l’image effrayante qui se trouvait devant lui. Il avait tout perdu, jamais il ne reverrai le soleil ni même une araignée, il avait pénétré la mort elle même. La rage s’empara de son âme. Avec un rictus cruel, il leva les yeux vers la haute paroi de pierre, frontière infranchissable entre son ancienne vie et les ténèbres. On lui offrait un nouveau départ, il n’avait d’autre choix que d’accepter mais il se jura au plus profond de lui même, que, quoi qui l’attende, il serait le plus ignoble des monstres de cette ville écœurante.
Résigné, il marcha vers la ville.
Ecrit par parasitemort, le Dimanche 25 Septembre 2005, 20:20 dans la rubrique "Parmi les fous".
Commentaires
fleurdekaramelle
25-09-05 à 21:37
C'est assez prenant, c'est une nouvelle?un roman?
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Re:
parasitemort
26-09-05 à 07:34
bah... je ne sais pas trop, c'est un truc entre les deux ^^, là jarrive vers la fin donc ce sera trop long pour une nouvelle mais un peu court pour un roman... merci d'avoir lu.
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